FRANÇOIS HOLLANDE TRIOMPHE EN FRANCE
JOURNAL QUÉBEC PRESSE PARIS — Revue de presse Victoire d'Hollande : ce que son discours dit déjà de sa façon de gouverner
Par François Jost, Le Nouvel Observateur Analyste des médias LE PLUS. En 2007, Nicolas Sarkozy avait prononcé son discours de victoire place de la Concorde, à Paris, entouré de son équipe de campagne et d'artistes. Le style fut tout autre pour François Hollande dimanche soir. François Jost, analyste de l'image et des médias, décrypte la séquence.
Édité et parrainé par Hélène Decommer inShare1Réagir
Le discours de victoire prononcé par François Hollande à Tulle, quelques dizaines de minutes après l'annonce des résultats dimanche soir, fut intéressant et instructif quant à sa façon de considérer et d'aborder le pouvoir. Le nouveau président de la République française a en effet nettement marqué la distinction entre la fonction présidentielle et la vie intime de l'homme.
Le discours de Hollande à Tulle après sa victoire par LeNouvelObservateur
Les deux corps du roi
La hiérarchie du discours de François Hollande s'inscrit dans ce schéma et dans la continuité de sa campagne présidentielle : il a commencé par parler des problèmes économiques de la France, de son programme, des enjeux nationaux, puis dans un second temps, il a resserré le champ sur sa région, sa ville, ses électeurs. Et c'est seulement à ce moment-là que la mise en scène s'est concentrée sur l'homme : François Hollande, sa compagne à qui il venait de confier les fleurs qu'on lui avait offertes, l'orchestre jouant "la vie en rose"… une ambiance de fête de village qui concordait avec la facette plus intime.
François Hollande a d'ores et déjà intériorisé ce qu'était la fonction présidentielle. On retrouve là la théorie de l'historien Ernst Kantorowicz sur les deux corps du roi - un corps terrestre et mortel, et un corps politique immortel.
Champ et contre-champ
Ce type de comportement ne s'était pas vu dans les succès présidentiels précédents. Certes, nous retrouvons avec François Hollande la même veine que chez François Mitterrand, qui s'était adressé aux Français devant la mairie de Château-Chinon avant de monter à Paris, place de la Bastille. Mais jamais la foule, les gens, les électeurs, n'avaient occupé une telle place dans le dispositif médiatique.
C'est là l'autre élément notable de la soirée électorale : le peuple a été mis en avant, visuellement, grâce à de nombreux contre-champs. Auparavant, la caméra restait essentiellement fixée sur les hommes politiques en train de s'exprimer. Cette fois-ci, on voyait aussi le public à qui ils s'adressaient. Il s'agit selon moi d'une des retombées de la campagne, dans laquelle nous avons vu de grands meetings et des démonstrations de force de la foule.
L'importance de la coulisse
Enfin, le comportement de François Hollande dans les premières minutes et les premières heures qui ont suivi sa victoire rejoint une autre évolution de la couverture médiatique de la campagne. Autant le nouveau président de la République a séparé la fonction de chef d'Etat et la fonction d'"homme mortel", autant les chaînes de télévision - France 2 en tête - ont séparé l'aspect politique de leurs émissions d'aspects plus intimes, à savoir les coulisses. Nous avons vu en effet une tendance de plus en plus grande à filmer le dessous des choses, l'arrivée des personnalités politiques dans les locaux des chaînes ou encore les mots échangés dans les couloirs.
François Hollande adopte cette logique, sans pour autant être dans la simulation, en ayant pleinement conscience de ce qui relève de la scène politique et de la sphère plus intime
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