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L'INCORRIGIBLE FACULTÉ D'OUBLI DE LA FRANCE ENVERS LE QUÉBEC
PAR MICHEL CLOUTIER Journaliste d'enquête JOURNAL QUÉBEC-PRESSE PARIS — La France tombe dans les conventions artificielles et les préjugés ridicules à l'égard des prochaines fêtes du 400e anniversaire de fondation de la ville de Québec de 2008.  Étant au coeur même de l'existence de l'Empire français en Amérique, la ville de Champlain manque de chance avec le ministre Bernard Koutchner et ses collègues français qui entendent fêter « la naissance de la ville de Québec... avec la naissance du Canada » (!) Grave erreur historique à l'horizon. (Photo Michel Cloutier) Les politiciens français auraient dû dire courageusement : « Nous allons fêter la naissance de la ville de Québec avec la naissance de l'Empire français d'Amérique et ses 200 ans de présence, jusqu'en 1763.» Et ainsi faire honneur à l'histoire, et sans déficit à notre histoire commune France-Québec.
Puisque l'histoire nous invite à nous regarder jusqu'au fond de l'âme sans rester inertes et passifs, nous disons à nos « cousins » politiciens impliqués : votre comportement est une bévue, une souffrante ignorance des faits qui vous isolent dans une tour d'ivoire dans sa suprême hauteur. Bref, vous êtes sans recours parce que vous manquez de culture. Honte à vous. Et au secours l'Académie française ! Au secours les quarante immortels ! venez à la rescousse de vos compatriotes fautifs, sortez votre génie en devenant le modèle authentique de la lecture historique du Québec. Manifestement hautement politiques, les fêtes protocolaires France-Québec se retrouvent donc dans l'amour romanesque de « ma cabane au Canada », ce Canada fédéral né en 1867... et non en 1608 sous l'impulsion du découvreur Samuel de Champlain. La politique canadienne ne manque pas d'espace ni d'oxygène pour imposer sa présence dominatrice lors des prochaines célébrations. Le Canada devient la suprême ressource, mettant les historiens aux abois, comme pour traquer le destin même du Québec qui n'aura plus d'oreiller pour reposer sa tête, c'est-à-dire son destin évident d'État-nation francophone en Amérique. Tout le monde le sait, le Canada a la partie facile en voulant sciemment évacuer le Québec de son destin de nation autonome et libre dans le concert des peuples libres de la terre. La France nous donne le goût du malheur et de l'absence historique en nous renvoyant à l'État canadien, véritable malédiction interne qui minorise le Québec. Le Canada, pays du melting pot à l'américaine et bien portant, devient pour le Québec une tragédie destinale stagnante, sans dénouement aucun que celui de l'assimilation tranquille de l'espace francophone, c'est-à-dire de la région linguistique québécoise au sein du multiculturalisme canadian. LES INTÉRÊTS FRANÇAIS Il est clair que les intérêts financiers français priment sur les intérêts supérieurs de l'État-nation québécois. Tout se passe d'un seul coup de baguette : « Nous aimons autant le Québec que le Canada. Mais nous devons priviliégier nos intérêts commerciaux canadiens avant ceux du Québec, c'est certain. Il n'est donc pas question de froisser Ottawa, la capitale fédérale », de confier un diplomate interrogé par Québec-Presse. COMPLOT FÉCOND Selon lui, c'est l'heureux aboutissement d'une conspiration commerciale France-Canada, un complot fécond, une perversion du coeur qui entrave et fige dans le futur le devenir souverain du Québec. « Ce ne sont pas des adieux à l'indépendance du Québec, mais vous devez savoir que seuls les Québecois devront décider de la faire cette indépendance si vraiment vos politiciens s'y engagent», d'ajouter le diplomate en question sous le couvert de l'anonymat afin d'éviter (à l'Élysée) toute forme de représailles à son endroit. La France de Sarkozy repousse ainsi cavalièrement le Québec, et froidement, sans tension interne ou externe, contrairement au général De Gaulle, captivé par l'essor autonomiste de la belle province, jusqu'à souhaiter son indépendance politique en criant « Vive le Québec libre ! » en 1967. Pas question de nuire aux relations France-Canada. En fait, les Bernard Kouchner zigzaguent avec l'histoire de la Nouvelle-France. Ils finissent par en faire une équation bêtement commerciale en devenant les thérapeutes de la finance dont le progrès ne mord qu'en terme d'ententes commerciales avec les hauts et les bas dans le cours de la Bourse... dans l'irrespect de la destinée nationale du Québec. En fait, dans ce contexte, notre destinée se trouve submergée par l'égo financier des multinationales. On sait trop que l'égo financier, brûlant soit-il, est le problème de tous les problèmes, un problème mortel pour l'équilibre démocratique des nations de la terre. UNE AVENTURE UNIQUE L'événement historique de la naissance de la ville de Québec en 1608, ne doit pas se réduire dans une angoissante minceur du destin, mais plutôt faire irruption dans sa charge d'aventure unique au sein de l'histoire du monde. Et sur le bon terrain social non mercantile, prédisposé à fêter les profondeurs des conquérants dont les énoncés célèbres n'échappent pas à l'histoire enseignée depuis l'avènement du seul État-nation francophone de l'Amérique du Nord.

À SUIVRE .
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