Désormais "troisième homme" du Parti socialiste français, Arnaud Montebourg est l’objet d’une cour assidue de la part de François Hollande et Martine Aubry, les deux finalistes de la primaire de la gauche.
Le premier a obtenu, dimanche, 38,9% des voix et la seconde 30,4%. Pour être investi candidat officiel du PS à l’élection présidentielle française, l’un et l’autre ont absolument besoin de recevoir l’appoint des électeurs d’Arnaud Montebourg lors du second tour de dimanche prochain. Avec ses 17%, il pèse de tout son poids.
Deux faces d'une même pièce
Pour l’instant, Montebourg n’a pas encore choisi lequel des deux finalistes bénéficiera de son soutien. Il l’a bien souligné lors de son interview télévisée d’hier soir [10 octobre] à France 2: "Il s’agit des deux faces d’une même pièce."
Peut-être donnera-t-il une consigne de vote: "Je vais leur écrire à tous deux une lettre que je rendrai publique afin qu’ils se prononcent sur le contrôle de la finance, la démondialisation, la lutte contre la corruption.
Mes amis et moi-même, ainsi que mes électeurs, nous nous déterminerons en fonction de leurs réponses." Arnaud Montebourg compte aussi sur le débat entre Martine Aubry et François Hollande qui se déroulera mercredi soir à France 2 pour établir son choix. Mais il souffle aussitôt le froid: "Il est possible aussi que je ne donne pas de consigne de vote."
Un faiseur de roi
Devenu faiseur de roi de la République, Arnaud Montebourg a construit en bonne partie son personnage politique contre la Suisse et son système financier.
En apparence, il semble prompt aux feux de bouche. C’est ignorer qu’il fut l’un des meilleurs avocats de sa génération – il a défendu Christine Villemin, la mère du petit Grégory assassiné – et qu’à ce titre Me Montebourg est un professionnel du verbe. Donc, lorsque dans une vidéo diffusée sur Internet par Betapolitique en janvier 2007, il traite la Suisse de "verrue", c’est de propos délibéré.
Même si ce qualificatif aussi épidermique que dermatologique était accolé à d’autres "paradis fiscaux", l’insulte a laissé des traces chez nous. Dans une tribune libre publiée le 2 janvier 2007 par Libération , Montebourg a donné pour exemple le blocus décidé par de Gaulle en 1963 contre la Principauté de Monaco, en évoquant la fuite de Johnny Hallyday vers le bon air fiscal de Gstaad.
Le nouveau "troisième socialiste" concluait ainsi: "Les gouvernements des Etats européens ne peuvent plus accepter les abus de voisins indélicats, comme la Confédération helvétique." En 2001, avec son camarade Vincent Peillon, Arnaud Montebourg avait rédigé un rapport au vitriol contre la Suisse à l’occasion d’une mission parlementaire française contre le blanchiment d’argent.
En fustigeant le "combat de façade" de notre pays contre le recyclage des fonds d’origine criminelle, Montebourg avait estimé que la Suisse restait un "prédateur de la finance mondiale".
Si la gauche parvient à l’Elysée l’an prochain, nul doute qu’Arnaud Montebourg disposera d’un poste important au gouvernement. La Confédération aura un ennemi haut placé outre-Jura.