|
  QUAND LES
ATHLÈTES
S'EFFONDRENT
ANALYSE MICHEL CLOUTIER Éditeur, Journal Québec Presse
FLORIDE — Tiger Woods, ce puissant milliardaire du vert, loin de la mentalité bourgeoise, peureuse et soupçonneuse, qui cherche toujours à se prémunir contre le danger, à acquérir partout des assurances et des garanties, pour la prospérité de ses affaires et le respect de ses patrimoines, ce Tiger Woods triomphateur, pratique plutôt la forme inférieure des mentalités sportives dont l'essor phénoménal est fabriqué, avec le talent certes, sur les podiums des tournois internationaux. D'un championnat à l'autre des continents.
Ce qui fait du "Tigre des Bois", l'homme ordinaire, l'homme parmi les hommes dont le foncier désordre d'une vie d'adultère fait malheureusement scandale à la une, non seulement de la presse pop en confessant (à regrets) ses liaisons, mais de la grande presse mondiale... avec ses rumeurs qui s'emballent autour d'une dizaine de ces dames charmeuses, devenues le point d'arrivée de sa "double vie".
Le golfeur du siècle ne s'est donc pas contenté d'éviter les abus de cet ordre, étant sans clarté intellectuelle aparente dans cette dérive morale.
Nombre d'athlètes s'effondrent ainsi, "victimes" pour les uns de dopage à travers les disciplines sportives, d'un pays à l'autre de la planète. Un monde de tricheurs élevé à la gloire. ATTENDU PAR LES PROJECTEURS
Prochain épisode ? Les projecteurs de la planète n'attendent plus le "Tigre des Bois" dans un prochain tournoi pour scruter à la loupe, bien entendu, les moindes gestes du super-champion.
Tiger Woods s'est temporairement retiré du vert, craignant perdre cette confiance vivace et alerte dans son jeu. Le golfeur le mieux payé au monde se sent seul. Plus que jamais.
METTONS-NOUS À SA PLACE
Mettons-nous à sa place, l'instant de l'imaginer à travers son prisme de golfeur éblouissant qui, néanmoins se refuse tout temps d'arrêt.
Je suis donc Tiger Woods dans ma pleine évidence de super-étoile, devant tout ce beau monde serré, en émoi; mes fans silencieusement retenus par le cordon de sécurité. Ils sont plus curieux que jamais, à la façon d'un écho, d'une résonnance cruellement grave qui atteint la cavité de ma conscience... oh! ma pauvre conscience ! par laquelle arrive le scandale. Incontournable réalité, je suis mis à nu.
Dans cette grande famille d'esprits ovationneurs, ces spectateurs plus avides que jamais, connaissaient mon histoire glorieuse au parcours immaculé à la surface du vert. Certes, à la surface du vert comme sur le ring et les tribunes, les foules se contentent de cette authenticité immédiate, étant subjugées par les exploits visuels déployés sous leurs yeux.
Mais cette fois-ci, mes fans, ces esprits en surface, ne s'intéressent plus à la grâce de mes mouvements. Les voilà braqués sur moi, leur conscience interrogeant ma conscience entachée. À me torturer. Je ne peux leur échapper. Tout me devient intérieur. Je mène un malheureux combat. C'est frustrant. Un très pénible effort à devoir me concentrer. Je redoute le pire: manquer l'élan du départ. Bêtement. Je me rends compte qu'il me manque cette intimité-intime à moi-même pour le réussir, cet élan. Je souffre.
Je suis traqué, mes fans sont là, tout un univers palpitant, imposant, terriblement présent. Mes fans explorent mon intimité, ils entrent dans l'espace de ma conscience. À me blesser dans mes entrailles. Ils découvrent ce que je suis, mes intentions cachées, malsaines, mes plaisirs interdits. C'est me faire échouer ce premier coup... à cause de...
J'ai un problème héroïque, tragique. Je dois agir par moi-même, livrer une bataille rangée, l'oeil impérativement fixé sur la balle. Je deviens passif comme un objet. Je dois lancer un coup pathétique, chargé d'émotion, un coup d'un trou tiens! Et vlan! Ça y est ! J'arrive enfin à m'exécuter, la balle fend le ciel et atteint, l'espace de l'imaginer, le fanion recherché et... le trou ! Tout un choc. Un fracas immense à me faire renaître. Je commence à revivre, mes fans s'illuminent, mon histoire est humaine, ce magistral trou d'un coup me transforme l'âme à retoucher mes mauvais coups. Je suis pénétré d'une grâce nouvelle, on dirait.
La femme serait-elle une erreur de perspective comme le péché de Satan?
En tout cas, je ne manque pas de perspective à cet instant. Mes fans redeviennent merveilleux. Ont-ils le pardon facile? Je ne contrôle pas leurs excès. À proximité de mon intimité, l'amour des grands idéaux est une charge volontaire pratiquée par certains fans qui, en toute franchise, me délaisseront. Tout pivote : les commanditaires qui battent dans la poitrine du Tigre ne tressaillent plus, ils délaissent l'instant divin de ses exploits, préférant des élans moins aventureux, pour ne pas dire sulfureux.
|